Etre belge?
30. červen 2010 Mathieu Detaille komentářeLes élections du 13 juin ont donné des résultats contrastés qui mettent la Belgique face à son destin. Les nationalistes flamands de la N-VA ont remporté 29% de l’électorat, alors que les socialistes wallons du PS ont glané 31% des voix. A droite toute au nord, à gauche toute au sud. A ceci près que depuis ces résultats historiques, la N-VA se montre plus conciliante sur le sujet de la scission du pays, et que le PS souhaite renforcer les compétences des régions.
Les élections du 13 juin ont donné des résultats contrastés qui mettent la Belgique face à son destin. Les nationalistes flamands de la N-VA ont remporté 29% de l’électorat, alors que les socialistes wallons du PS ont glané 31% des voix. A droite toute au nord, à gauche toute au sud. A ceci près que depuis ces résultats historiques, la N-VA se montre plus conciliante sur le sujet de la scission du pays, et que le PS souhaite renforcer les compétences des régions. Au pays du surréalisme, la fin est souvent inattendue. La raison est qu’il faut absolument créer un gouvernement et, à l’instar des Pays-Bas, la composition des majorités gouvernementales est un processus de négociations secrètes qui dure généralement deux bons mois. Mois durant lesquels rien ne filtre, ou très peu, que ce soit du côté des perdants comme des gagnants du scrutin. Période de relatif répit donc, que je souhaite mettre à profit pour parler de la Belgique d’une manière plus estivale.
Il est une question que bien des Belges se posent, alors qu’elle est saugrenue pour leurs voisins:
Qu’est-ce qu’être Belge?
Belle question. Être belge, c’est habiter un point de rencontre de cultures européennes encadré par des frontières fixées en 1830 par des Français et des Anglais. Pour se donner de la consistance, le nouvel État est allé trouver des racines dans un peuple celte que Jules César a décrit comme «le plus brave».
Fort bien.
Mais pour un Belge, cette histoire celte signifie très peu de choses.
À part les frites, la bière, le chocolat, un Roi original et quelques saveurs langagières, qu’est-ce qui fait l’essence d’un Belge?
Tonalité historique: un francophone belge se définit notamment comme « n’étant pas Français». Et l’Histoire lui donne raison: un wallon a vécu 20 ans sous domination française, mais 150 ans sous les Habsbourg, 150 ans sous les Espagnols, 80 ans sous les Autrichiens… Ces chefs d’État lointains laissaient une grande marge de manœuvre aux habitants, qui ont développé un esprit particulariste fort. Il se traduit par une volonté de traiter localement ce qui peut l’être. Ainsi les villes ont des pouvoirs importants qu’elles ont jalousement gardés durant les nombreux changements de propriétaire. La France jacobine, au contraire, a tout concentré à Paris, alors que la Belgique a conservé puis renforcé les pouvoirs délégués aux entités locales dès le Saint Empire romain germanique.
Tonalité sociale: les Belges préfèrent résoudre les problèmes calmement autour d’une table et réfléchir à un compromis satisfaisant, sans vainqueur ni déçu. Cette habitude semble être à l’origine par exemple de la longévité du régime par rapport à ses voisins européens, et de la modernité de son système social qui assure le calme de la population. L’indexation obligatoire des salaires, par exemple, témoigne du souci de garantir au travailleur un pouvoir d’achat qui suit l’inflation et contribue en même temps à la paix sociale du pays.
Tonalité psychologique: le surréalisme. Au-delà du courant artistique, un Belge vit dans un cadre complètement différent du Français ou du Néerlandais. Les repères sont mouvants, le compromis est la règle d’or, et les arrangements rocambolesques la solution préférée. Les Belges sont également habitués depuis leur plus jeune âge à vivre dans un pays à l’avenir incertain, dont on pressent une fin… qu’on ne voit jamais. Enfin, un Belge ne sait jamais vraiment ce qui fait qu’il est Belge : aucun héros fondateur, aucun mythe, aucune légende nationale. Il est Belge parce qu’il est né en Belgique, et c’est déjà pas mal.
Tonalité artistique: cultures mélangées et avenir incertain sont à l’origine de ce que l’on appelle la «belgitude». C’est une sorte de mélancolie diffuse provenant de racines introuvables et d’un avenir instable. Pour beaucoup d’artistes, ce mal être est à l’origine de l’intense activité créatrice du plat pays que l’on retrouve dans le cinéma d’auteur, le journalisme, la mode, les productions théâtrales…
Tonalité absurde: c’est prendre un train qui zigzague autour de la frontière linguistique, comme celui qui relie Eupen à Bruges. Le contrôleur du train, en traversant une portion flamande du trajet, vous annonce que la prochaine station est Borgworm. Pourtant, à l’arrivée en gare, les panneaux indiquent que vous êtes à Waremme, ville située en territoire francophone. Il s’agit bien d’une même ville dont la traduction diffère d’une langue à l’autre, mais personne ne vous a averti.
La Belgique est à la croisée de destins européens, et reflète en concentré ce qu’est l’Europe: des influences multiples, contradictoires, où les passions des uns effrayent les autres, mais où, en fin de compte, le souhait de trouver une solution, quitte à être bancale, est plus important que l’échec.
En bon belge, je terminerai en disant que l’avenir n’est pas écrit. Si le 22 avril 2010 (cfr. article de mai 2010) constitue bel et bien un événement grave pour la Belgique, en proclamer la fin est hasardeux. La Belgique de demain sera toute différente, c’est certain. Mais sa disparition n’est pas programmée. Car, même en admettant une sécession flamande, les francophones ont déclaré qu’ils souhaitaient conserver le nom Belgique, qui leur est cher.
Au pays du surréalisme, l’imagination est reine, et la Belgique, sans imaginaire collectif, n’existerait pas.
Qu’est-ce qu’être Belge, donc? Croire à l’impossible et faire en sorte qu’il se réalise, voyons!
Sources:
- Le Monde, 14 juin 2010: voir LeMonde.fr
- Marie-Thérèse Bitsch, «Histoire de la Belgique de l’Antiquité à nos jours», Ed. Complexe, Paris, 2004.
Odpovědný redaktor: Bc. Ondřej Stulík
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Jak citovat tento text?
Detaille, Mathieu. Etre belge? [online]. E-polis.cz, 30. červen 2010. [cit. 2024-09-12]. Dostupné z WWW: <http://www.e-polis.cz/clanek/etre-belge.html>. ISSN 1801-1438.
Autor: Mathieu Detaille
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